Un grand nombre d’entreprises (170 000 TPE et 15 000 PME/ETI selon une étude récente de l’Observatoire de la BPCE) sont appelées à être transmises dans les prochaines années, notamment en raison de l’âge avancé de leur dirigeant. Et aujourd’hui, ce ne sont pas moins de 4 dirigeants sur 10 qui envisagent, à plus ou moins long terme, de céder leur affaire. Mais souhaiter vendre est une chose, parvenir à ses fins en est une autre. Car la transmission d’une entreprise constitue une opération longue et complexe. Zoom sur les principales étapes de ce processus.
Trouver un repreneur
Pour avoir des chances d’aboutir, la recherche d’un repreneur doit être large.
Transmettre une entreprise n’est pas chose aisée car il peut tout d’abord être compliqué de trouver un (bon) repreneur. Et ce d’autant plus qu’une telle opération se veut généralement confidentielle, le cédant pouvant légitimement craindre que la mise en vente de son entreprise n’inquiète ses clients et ses partenaires.
Aussi, pour débusquer un repreneur, il convient de « ratisser large ». D’abord, en activant l’ensemble de ses réseaux, tant personnels que professionnels, c’est-à-dire sa famille, ses fournisseurs et ses concurrents. Ensuite, en faisant part de son projet aux organismes consulaires et aux fédérations professionnelles. Et en n’hésitant pas à solliciter son banquier et son cabinet d’expertise comptable car l’un comme l’autre sont susceptibles, grâce à leur propre réseau, de mettre le cédant en relation avec un ou plusieurs repreneurs potentiels. Enfin, la diffusion de son projet sur les « bourses d’affaires » présentes sur Internet ne doit pas être négligée.
Vendre le fonds de commerce ou les parts sociales
La vente d’une entreprise individuelle consiste à céder le fonds de commerce tandis que la vente d’une société s’opère généralement par le biais d’une cession de titres.
Lorsque l’entreprise à céder est une entreprise individuelle, le dirigeant vendra son fonds de commerce. Celui-ci est composé de la marque, du nom commercial, de l’enseigne, de la clientèle, du droit au bail ainsi que du matériel et du mobilier. Et très souvent, la cession du fonds s’accompagne de la cession des stocks. Dans ce cas de figure, ni les contrats ni les dettes ne sont transférés au repreneur, ce dernier n’achetant que des biens. Le vendeur doit donc gérer la cessation de son activité en encaissant les créances restant dues, en remboursant ses créanciers et en soldant ses comptes.
Si l’entreprise est une société (SARL, SAS…), la transmission s’opère, cette fois, sous forme de cession des titres. Ici, c’est toute l’activité, fonds de commerce, créances, contrats, trésorerie, etc., y compris les dettes de l’entreprise, qui est vendue. Cette opération est donc généralement synonyme pour le cédant d’un engagement de garantie de passif au profit de l’acquéreur.
Evaluer l’entreprise
L’évaluation d’une entreprise peut s’effectuer selon différentes méthodes.
Avant de céder une entreprise, il est primordial d’en connaître la valeur. Pour ce faire, il existe globalement deux grandes méthodes d’évaluation.
La première, la méthode patrimoniale, consiste à inventorier les éléments d’actif et de passif composant le patrimoine de l’entreprise. Cette opération, réalisée sur la base du bilan, revient à raisonner sur l’actif net comptable. Mais cette approche est insuffisamment précise car les valeurs comptables ainsi obtenues, sur la base de situations antérieures, nécessitent d’être réévaluées (fonds de commerce, immeubles, stocks, créances...) afin de rendre l’ensemble plus conforme à la réalité économique du moment.
La seconde méthode, dite de la rentabilité, part du postulat selon lequel la valeur d’une entreprise dépend de sa rentabilité passée mais également de celle qu’elle sera en mesure de dégager dans le futur. Ainsi, pour obtenir une estimation de la valeur de l’entreprise, on applique à son résultat net, à son résultat d’exploitation ou à son excédent brut d’exploitation un coefficient multiplicateur traduisant les hypothèses de croissance espérées.
Une fois la valeur de l’entreprise déterminée, souvent par la conjugaison des deux méthodes, vient ensuite le temps de la négociation entre les parties, à l’issue de laquelle le prix de vente sera déterminé.
À noter : dans le cadre des opérations précédant leur cession, les entreprises d’une certaine taille font très souvent l’objet d’un audit d’acquisition, généralement diligenté par le repreneur, destiné à évaluer leurs forces et leurs faiblesses.
Formaliser la cession
La cession doit être formalisée dans un acte.
Après être tombés d’accord sur les biens à transmettre et sur leur prix, cédant et repreneur doivent formaliser leur consentement dans un acte. Un compromis de vente ou un protocole d’accord, qui prévoit la signature ultérieure de l’acte définitif mais qui les engage d’ores et déjà, est alors dressé. Rédigé par des professionnels, cet acte est fondamental car il reprend chaque point de la négociation et fixe les droits et obligations de chacune des deux parties. Il précise notamment les modalités de la reprise (accompagnement du cédant, reprise de certains engagements, etc.), le prix de vente et ses modalités de paiement ainsi que les éventuelles conditions suspensives à la réalisation desquelles la cession est subordonnée.
Attention : l’employeur qui cède son fonds de commerce ou la majorité des parts sociales d’une SARL (ou des actions d’une société anonyme) doit en informer au préalable ses salariés pour leur permettre, le cas échéant, de présenter une offre de reprise. Et attention, le non-respect de cette obligation est susceptible d’être sanctionné par une amende civile pouvant atteindre 2 % du prix de la cession.
Estimer le coût fiscal de la cession
Les incidences fiscales de la cession sont prises en compte au premier chef.
L’incidence fiscale de la cession est évidemment une préoccupation majeure du vendeur. Plusieurs hypothèses doivent être distinguées.
• La vente d’un fonds de commerce (ou de titres si le cédant est associé d’une société de personnes relevant de l’impôt sur le revenu) déclenche l’imposition immédiate des bénéfices et des plus-values. Ces dernières sont taxées soit au barème progressif de l’impôt sur le revenu, assorti de cotisations sociales, soit au taux réduit de 16 % auquel s’ajoutent les prélèvements sociaux. Fort heureusement, plusieurs mécanismes sont prévus pour réduire cette imposition, sous réserve, bien entendu, d’en réunir toutes les conditions d’application (nature de l’activité, durée d’exercice…). Ainsi, les petites entreprises (TPE) peuvent être exonérées totalement lorsque leurs recettes sont inférieures à 250 000 € pour les activités de ventes ou de prestations d’hébergement et à 90 000 € pour les autres prestations de services. Les PME peuvent également être exonérées totalement lorsque la valeur du fonds ne dépasse pas 300 000 €, hors immeubles. Ces deux dispositifs concernant tant l’impôt sur le revenu que les prélèvements sociaux. Et une exonération spécifique peut, en outre, s’appliquer dans le cadre du départ à la retraite du cédant. Toutes les plus-values étant alors exonérées d’impôt sur le revenu, excepté les plus-values immobilières. Étant précisé pour finir que les dispositifs TPE et PME sont exclusifs l’un de l’autre, mais peuvent se cumuler avec l’exonération pour départ à la retraite.
• Si l’entreprise est une société, la cession des titres obéit à un autre régime fiscal. Les plus-values sont alors imposées au barème progressif de l’impôt sur le revenu après application, le cas échéant, d’un abattement pour durée de détention des titres. Abattement qui peut notamment être majoré lorsque le dirigeant d’une PME soumise à l’IS cède ses titres pour partir à la retraite. Mais dans tous les cas, les plus-values restent soumises aux prélèvements sociaux.
Remarque générale : la cession d’une entreprise est une opération complexe qui nécessite de faire appel à des professionnels du chiffre et du droit. Vos conseils habituels (avocat, expert-comptable) sont à même de répondre à vos interrogations et de vous accompagner dans votre réflexion et tout au long de votre démarche.