Lorsqu’une propriété comprenant notamment des terres louées est mise en vente et qu’elle constitue un ensemble indivisible, le locataire ne peut pas contraindre le vendeur à diviser la vente pour qu’il puisse préempter uniquement les parcelles louées.
Lorsqu’un terrain agricole loué à un exploitant est mis en vente, ce dernier bénéficie, en principe, d’un droit de préemption qui lui permet de l’acquérir en priorité avant tout autre acheteur potentiel.
Rappel : pour bénéficier du droit de préemption, le locataire doit avoir exercé la profession agricole pendant au moins 3 ans et exploiter, par lui-même ou par le biais de sa famille, la parcelle mise en vente.
Sachant que lorsque la vente porte sur un domaine qui est loué pour partie seulement, le vendeur doit, en principe, diviser l’opération de façon que l’exploitant locataire puisse exercer son droit de préemption uniquement sur la partie qu’il loue.
Toutefois, par exception, lorsque la propriété mise en vente est considérée comme étant indivisible, le vendeur est en droit de procéder à une vente globale du tout, même si elle comprend des terres louées. Et dans ce cas, l’exploitant locataire ne peut pas exiger de ce dernier qu’il divise la vente de façon à lui permettre de préempter uniquement les parcelles louées. Son droit de préemption doit alors s’exercer sur l’ensemble de la propriété mise en vente.
C’est ce que les juges ont décidé dans une affaire où le propriétaire d’un domaine comprenant un château, des dépendances, un parc et des terres louées à un agriculteur avait décidé de le vendre dans son ensemble. En effet, ayant constaté que le château et le parc étaient isolés au milieu de l’exploitation agricole, et donc imbriqués avec les parcelles louées, et qu’ils partageaient avec celles-ci des voies d’accès communes, les juges ont estimé que cette propriété était indivisible.
Du coup, l’agriculteur n’ayant pas voulu acheter l’ensemble de la propriété, sa demande de désignation d’un expert pour déterminer le prix de vente des terres louées a été rejetée.
À noter : les juges apprécient l’indivisibilité de manière très restrictive. En effet, lorsque l’indivisibilité est reconnue, elle risque d’empêcher le locataire de pouvoir acheter en raison du trop élevé prix de l’ensemble.
Cassation civile 3e, 11 octobre 2018, n° 17-23634